Salon du Bourget 2025

Les médias vont-ils encore passer les plats au « fleuron de l’industrie européenne » ?

Depuis des années, le Salon international de l’aéronautique et de l’espace est «Le» moment du secteur censé faire rêver les férus d’aviation. Et si cela ne vous fait pas rêver c’est que vous êtes un rabat-joie. Alors, on vous en sert matin et soir pendant une semaine. Parfois un peu plus, car le Salon est annoncé en général une bonne semaine avant, lorsque les rédactions commencent à s’informer. 

Ce salon aura cent seize ans cette année. Si en 1909 la première édition présente un secteur nouveau et méconnu, en 2025 il représente tout autre chose. 

En effet, 1909 signe la première traversée de la Manche par Louis Blériot ainsi que le premier vol avec deux passagers et la création des brevets de pilote. Il aura fallu dix ans de plus pour réussir le premier vol transatlantique. 

1955, année où le Salon s’ouvre au Bourget, l’aviation s’est bien développée et transporte déjà plus de 52 millions de passagers ! Charles Louis Breguet, détenteur du brevet de pilote et cofondateur d’Air France, meurt cette année-là. 

En 1969, le premier vol d’un avion supersonique a lieu dans le ciel de Toulouse : le Concorde 001. De l’autre côté de l’Atlantique, le plus gros avion commercial, le Boeing 747, fait également son premier vol. Cette même année, Orly et le Bourget combinés voient passer plus de dix millions de passagers. 

En 1974 est inauguré l’aéroport Charles de Gaulle après huit ans de travaux et un aéroport d’Orly proche de la saturation avec plus de quatorze millions de passagers par an. 

En 1999, le GIEC publie un rapport spécifique à l’aviation qui fait état de 514 Mt de CO2 émis par l’aviation en 1992 et écrit déjà que « Les émissions totales de l’aviation ont augmenté, car la demande accrue de transport aérien a progressé plus vite que les réductions dans les émissions spécifiques dues à des améliorations constantes de la technologie et des procédures opérationnelles. » 

Aussi, il y a vingt-six ans, le GIEC prévoyait déjà une large augmentation des émissions du secteur en cas d’absence de restrictions réglementaires. Et les scientifiques prévoyaient entre 844 Mt et 5 395 Mt de CO2 émis par l’aviation en 2050. En 2019, l’aviation a émis un milliard de tonne de CO2 équivalent, un niveau d’émissions dépassé en 2024. Le GIEC a donc vu juste dès 1999 et les restrictions réglementaires se font toujours attendre. 

En 2021, l’ISAE Supaero, une des meilleures écoles aéronautiques de France (et donc du monde !), a publié un rapport Aviation et climat qui reprend l’état de la connaissance scientifique pour faire un point d’étape et présenter des scénarios possibles. Les résultats sont sans appel et reprennent quasi mot pour mot les alertes faites en 1999 : sans restrictions règlementaires, les émissions de l’aéronautique continueront d’augmenter. 

Pour finir notre rapide historique de l’aviation, 2024 aura enregistré un record de passagers transportés et un record d’émissions de gaz à effet de serre. Et ce malgré toutes les annonces faites en grande pompe depuis 2020 sur la « transition du secteur ». Ainsi, les quasi cinq milliards de passagers transportés l’an dernier ont émis plus d’un milliard de tonnes de CO2 équivalent (incluant les effets des autres GES émis par la combustion du kérosène). 

Nous en appelons donc aux médias : allez-vous une année de plus cantonner les scientifiques sur le banc de touche ? Allez-vous une année de plus passer les plats à une industrie hors de contrôle tout en indiquant simplement que « les associations de défense de l’environnement alertent sur les conséquences des émissions » ? Allez-vous une année de plus laisser les PDG des grands aéroports et des grandes compagnies parler sans contrôle scientifique ? Allez-vous une année de plus proposer des faux débats en accusation des manifestations écologistes ?

Le collectif PAD

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