Avion à Hydrogène : l’Arlésienne ou l’Hyperloop d’Airbus

Après plusieurs années d’intoxication médiatique, Airbus annonce remettre sine die son projet d’avion dit à hydrogène. Ce report, qui ressemble à un abandon, ne surprendra pas celles et ceux qui suivent avec attention l’évolution du secteur aéronautique.

Qui a pu croire un instant que l’on allait pouvoir embarquer dès 2035, dans un aéronef destiné au transport de personnes, de l’hydrogène stocké sous forme liquide à -253°C ? Puis le détendre en vol pour, soit alimenter un système de fabrication d’électricité grâce à une pile à combustible, soit brûler directement cet hydrogène dans des réacteurs ? 

Au-delà de la donne technique, les quantités d’électricité bas carbone nécessaires à la production d’hydrogène sont telles que, même si la recherche aboutit à la faisabilité de la motorisation à hydrogène, il y a aujourd’hui une indisponibilité de ressources.
Exit donc l’avion à hydrogène… et pour des lustres

Est-ce que cette annonce est une bonne nouvelle ?
Nullement.
Est-ce que le secteur s’est rendu compte que sa croissance n’est pas possible si elle souhaite être durable ?
Toujours pas. Malheureusement la part du réchauffement climatique dû au trafic aérien a encore de beaux jours devant elle.

En effet, le doublement annoncé du trafic aérien et de la construction d’avions fait frissonner ceux qui savent que l’aviation commerciale participe à hauteur de 5 à 6 % au réchauffement climatique récent (en tenant compte de tous les effets réchauffant). 

L’abandon de ce projet d’avion à hydrogène est un aveu qui en appellera d’autres 

Qui peut croire aux prévisions de carburants bas carbone ? A l’échelle mondiale, ils n’ont pas encore atteint 1% du total de kérosène brûlé en 2024. Sommes nous prêts à abandonner des productions vivrières comme le font les Etats-Unis pour en augmenter la production ? Sommes nous prêts à supprimer toutes les normes environnementales et à suivre Trump et son “vent d’optimisme” vanté par Bernard Arnaud après son investiture ? Quel est le plus “essentiel”: faire voler toujours plus d’avions ou se nourrir mieux ? L’évidence de la réponse n’est pas garantie aujourd’hui. Les ressources terrestres n’étant pas extensibles, il y a bel et bien une opposition de modèle.

Peu importe les faits, peu importe la contribution du secteur au réchauffement climatique, les publicités pour les voyages lointains pullulent, les avions se remplissent et les carnets de commandes sont remplis. Toute critique est présentée comme une menace pour l’économie et les emplois. 

L’économie est donc prioritaire, mais jusqu’à quand cette économie sera une réalité ? De plus en plus de territoires français ne sont plus assurables face aux répétitions des catastrophes amplifiées par le réchauffement global. Si nous gagnons des milliards en vendant des avions, combien en perdons-nous en épongeant les inondations et en réparant nos maisons ? Combien en perdons-nous en nous soignant des conséquences des pollutions sonores et atmosphériques ? 

Nous ne pouvons laisser l’avenir de notre territoire entre les mains de décideurs, appartenant à une techno-structure économique et politique, qui continuent de regarder ailleurs. 

Nos emplois sont directement menacés par le réchauffement climatique et par le dépassement des limites planétaires. “Pas d’emplois sur une planète morte” crient les jeunes de Fridays for Future. La communauté scientifique leur donne raison et nombre de collectifs ont depuis plusieurs années tiré la sonnette d’alarme sur le danger que représente pour nos territoires et ses habitants cette dépendance à une industrie dont les perspectives sont pour le moins incertaines. 

Le problème de la pollution de l’atmosphère par l’aviation, et, de façon plus générale, les questions de changement climatique, n’ont pas de solutions tout-technologiques. En effet, ces questions ne sont pas simplement techniques, elles concernent la place de l’humain dans la nature et nous obligent à adapter notre mode de vie aux lois naturelles. 

Aucune fusée, aucun avion, à hydrogène ou à eau ne nous permettra d’éviter le mur qui se rapproche, mais qui souhaite réellement l’éviter ? 

Le collectif PAD

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