Trois ans de perdus ?

En 2020, sept cents étudiantes et étudiants des écoles d’aéronautique prenaient la parole, interpellant Airbus & co sur la décarbonation rapide nécessaire de leur futur secteur et se rendaient jusqu’au ministère de la transition écologique alors porté par Elisabeth Borne. Madame la Première Ministre où en est votre promesse d’imposer l’affichage les contenus carbones des produits de consommation et pourquoi ne pas avoir commencé par les billets d’avions et les produits importés ?

La semaine dernière, plus de trois ans après, l’association Atterrissage d’urgence a emballé de vert un avion d’apparat présent sur le campus de l’ISAE Supaéro pour dénoncer le greenwashing dans lequel se complait encore notre secteur. Quelques jours plus tôt, des élèves de l’INSA avaient dénoncé la présence d’entreprises irresponsables à leur salon école/entreprises. 

Trois ans qui ont permis de passer du déni de réalité au greenwashing. Trois ans pendant lesquels une tonne de rapports, de scénarios, de prospectives ont été publiés alors que le trafic et les émissions continuaient d’augmenter pour se rapprocher des niveaux de 2019. Une croissance et de nouvelles lignes de production d’avions fossiles toujours sous les applaudissements de tout le gratin du secteur, accompagné de très près par le gouvernement et le Président.

SCOOP : les belles présentations d’Airbus et de l’ATAG sont dans l’impossibilité de réduire les émissions globales et les autres nuisances de l’aéronautique. Cette réalité n’a pas changé depuis trois ans.

Cette année a vu le ridicule prototype d’avion à hydrogène au dernier salon du Bourget et l’aveu d’un report de son hypothétique mise en service. Bien loin des annonces fortement médiatisées d’Airbus en 2020.

2023 a également sonné le glas de la stratégie des SAF qui, de l’aveu même des compagnies, nécessitera une quantité telle de biomasse et d’électricité que des conflits d’usages sont inévitables. Qu’à cela ne tienne, « nous importerons tout simplement de l’électricité » comme l’a proposé le PDG de Lufthansa. Le monde est si simple lorsque l’on est PDG.

Mais tout cela a été écrit et réécrit maintes fois. 

Ici et là l’évidence de la décroissance organisée et solidaire du trafic est évoquée au risque d’essuyer un torrent d’insultes allant jusqu’au Ministre de l’économie. Pourtant, à la tête d’un tel ministère, la réalité des chiffres ne devrait pas être un secret. Un déni de plus ? Ou « une dangereuse idéologie » ? Combien de temps allons nous regarder les émissions augmenter avant de faire confiance à la science ? Combien de temps allons nous encore pouvoir aller en avion à Séville pour 40€ depuis Toulouse tandis que l’aller vers Paris coûte 80€ en train?

Les écoles d’aéronautique forment de bon.nes ingérieures qui savent aussi manier les études et les chiffres. Au lieu de les intimider, leurs directions d’études devraient les soutenir. Les chercheurs et chercheuses de ces mêmes écoles tiennent les mêmes propos :  « Sans décroissance la décarbonation du trafic aérien est impossible ». 

Nous sommes las de devoir encore et toujours monter des actions spectaculaires pour être visibles, pour être simplement entendus. Nos positions ne sont pas contestataires mais progressistes; elles s’inscrivent dans un futur désirable et solidaire. 

Au delà d’un avion repeint ou emballé en vert, faisons la lumière sur les propositions pour un autre développement de nos territoires et de notre économie. 

Faisons la lumière sur le monde de demain qui se construit pas à pas et en silence. Quelques exemples parmi des milliers :

  • Les salariés de GKN à Florence qui ont lancé un actionnariat populaire pour leur coopérative imaginée avec Friday For Future pour passer de l’industrie automobile à l’industrie du vélo et des énergies renouvelable.
  • Les coopératives SailCoop et WindCoop qui proposent respectivement des traversées en voiliers et du fret par cargos à voiles. 
  • La Gazelle : la voiture low-tech électrique made in France 
  • VirgoCoop qui travaille à la remise sur pied d’une industrie textile en France basée sur le chanvre.
  • Les Ateliers Icare qui proposent de passer aux 4/5 pour travailler dans les champs pour aider les maraichers locaux et contribuer à la transition et à la résilience alimentaire des territoires tout en diminuant leurs émissions de 20%.
  • GreenGo qui propose des voyages bas carbone

Vous en connaissez sûrement d’autres. Ces projets ne sont pas parfaits mais ils ont le mérite d’aller dans le bon sens. Bien loin des projecteurs sur les avancées trop lentes des COP, ces projets nous permettent de voyager dans le futur avec un peu d’espoir, rejoignons les !

Le collectif PAD

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